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Pour Priax: Le Lache

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Alyciane's avatar
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Les flammes des torches crépitaient et laissaient paisiblement la fumée chaude monter au plafond de l’académie. Dans le couloir des chambres, le silence. Pourtant, en écoutant mieux, d’étranges cliquetis raisonnaient dans les ombres dansantes. Hanabu aussi les avait entendu. Il mordit l’oreiller et son cœur tambourina ses tympans : non, pas encore ! Ses larmes montèrent aux yeux et il poussa un gémissement effrayé. Les cliquetis montaient vers lui, se transformaient en rires étouffés de chuchotements. Son corps fut pris de tremblement, ce corps qui se souvenait encore des blessures laissées trois jours avant. Il se cacha sous son drap, laissa ses larmes mouiller son visage et se recroquevilla. Fuir, il devait fuir, se cacher, disparaître. Il ne fallait pas qu’ils le trouvent encore. Dans un dernier effort, il roula sur lui-même et tomba dans un bruit sourd sur le plancher. Il rampa, étranglant au fond de sa gorge ses gémissements angoissés. Ses ongles griffaient le bois, désespérés, et l’emmenèrent jusque dessous le lit. Caché dans l’ombre comme un enfant effrayé : pouvait il ainsi le retrouver ? Oui, il en était sûr : c’était des démons, des oni qui le persécuteront sans relâche.
Les chuchotements devinrent enfin plus nets. Des ombres se dessinaient sous la porte  et s’étiraient jusque dans la cachette de Hanabu. Il frémit, ferma les yeux. La porte s’ouvrit et laissa passer, comme un fantôme, un visage glabre et hilare. Ses yeux ronds et rouges fouillèrent la pièce, puis redisparurent rapidement.
« Hey les gars ! Je crois qu’on va avoir le droit à une partie de cache-cache en prime ! »
La porte se rouvrit violement et Hanabu ne put retenir un petit cri suppliant. S’en était fini : il n’avait pas pu résister longtemps. On le tira rapidement par la jambe, et, se débattant, on le calma à coups de pieds. Il était plaqué là, sur le sol comme un papillon épinglé, regardant ses adversaires tel un animal traqué. Ils étaient cinq, tous à moitié saouls, tous un sourire aux lèvres. Le plus grand _le chef_ avait déjà donné ses instructions. Hanabu déglutit : il maudit le jour où il l’avait malencontreusement bousculé. Ankai le Blanc, le plus charismatique, le plus fort aussi, de toute sa classe.
« Met-toi à genoux ! A genoux je t’ais dis !
Hanabu s’exécuta en gémissant de peur. Il les supplia de le laisser, rampa presque devant eux.
-Regardez comme il aime ça, d’être à terre !
-Ouais ! Aboie ! Fais le chien !
-Mets toi à poil, et fais le chien ! »
Un des garçons sortit un long bâton de bambou et gifla plusieurs fois sa victime. Hanabu, déjà absent, se laissa faire en pleurant. Humiliations, tortures, ce n’était qu’un jeu pour eux.
Quatre heures de supplices. Quatre longues heures. Ses bourreaux avaient même fait une pause entre deux, pour se remettre de leurs émotions sans doute. Hanabu aurait pu tout faire pour arrêter ça : vendre sa mère, son père, trahir les siens, son pays tout entier. Mais rien n’y faisait, ils revenaient toujours.
Hanabu restait figé, pleurant sous la pluie automnale. Nu dehors et en pleine nuit, il ne savait plus si c’était son sang ou l’eau qui coulait entre ses omoplates. Sur son torse étaient gravés, au couteau, des insultes. Les autres avaient déguerpis au son de passants aventureux, et lui était resté seul, planté là, humilié et perdu. Enfin, il poussa un cri inaudible et plongea le visage dans ses mains.
Ses parents s’étonnaient de ne plus le voir. Ses professeurs le submergeaient de travail disait-il. Comment pouvait-il leur avouer ? Leur dire qu’il ne voulait pas montrer ses blessures, sa honte, son impuissance. Il ne pouvait plus vivre comme ça : il devait faire quelque chose.

Le lendemain, le soleil perçait timidement les épais nuages gris. Hanabu, le kimono serré jusqu’à la gorge, l’air déterminé, fouillait la cour du regard. Il avait la mâchoire serrée, l’œil éclairé par une étrange pulsion. Ankai, il devait trouver Ankai. Lui dire sa façon de penser. Non, pas de face, pas à sa portée : juste de quoi lui dire sans qu’il n’ai le temps de rien.  Pas de coups, pas de cris, pas de pleurs, quelque chose de propre et de net.
Enfin, il le trouva près de la grande fontaine, jasant avec son harem, déployant parfois d’un air distrait un pan de son kimono. Il ressemblait à un grand oiseau, blanc et gracieux. Hanabu sentit sa respiration s’accélérer, son cœur se serrer, mélangeant dans sa bouche les goûts étranges de la peur et de l’extase. Il ne veut plus être la proie, il sera le chasseur.
La cloche raisonna : les cours reprenaient. Tous se dirigèrent à pas lent vers les couloirs de la grande bâtisse et s’engouffrèrent en piaillant. Ankai, seul dans un croisement sombre, attendait patiemment l’un de ses amis. Il fit un geste à un autre, commença à lui parler. Hanabu frémit, et, rasant les murs, s’approcha de lui lentement. A quelques pas, il se précipita sur lui. Il ne s’arrêta que quand il le cogna, sentant sur ses mains un liquide chaud, lui brûlant presque les mains. Ankai poussa un long râle, tourna la tête, les lèvres rougis par le sang.
« …dans le dos !
Hanabu fit un sourire fiévreux et tourna lentement la dague, faisant crisser la lame sur les os.
-Le lâche appelle le lâche.
Le garçon fit un dernier soubresaut, le vêtement rouge, et s’effondra à ses pieds. Hanabu le fixa, tomba à genoux et pleura une dernière fois.
Nouvelle pour priax, ayant pour theme la lacheté ^^

Fait en 2heures ^^
© 2006 - 2024 Alyciane
Comments1
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Fidranth's avatar
C'est édifiant. L'histoire est bien ficelée. Bravo.